Situé à Paris, l’Ifri est un centre de recherches et de débat indépendant ayant pour but d’étudier les grandes questions climatiques et de transition énergétique en France et en Europe. Le dernier rapport de l’Ifri date de mars 2022 et il met en évidence les plus et les moins des stratégies européennes de décarbonation de l’électricité et de gouvernance énergétique. Les modèles présents aux Pays-Bas, au Royaume-Uni ou au Danemark ont été étudiés et des conclusions tirées, afin de permettre à chacun de répondre au défi de la transition énergétique, notamment en matière de coût-efficacité des politiques publiques. Alors, que retenir de ce dernier rapport pour la France ?
Accélérer la baisse des émissions de gaz à effet de serre, l’objectif de la France
Le suivi des politiques sectorielles européennes va de pair avec la recherche des objectifs inscrits dans la loi française pour le climat : réduire de 55 % les émissions nettes d’ici à 2030, par rapport au niveau de 1990. Malgré la création du Haut Conseil pour le Climat en 2018 et d’autres mesures structurantes, il est désormais temps de recueillir autant de bonnes pratiques que possible de nos voisins pour faire front ensemble aux problématiques de réchauffement climatique. Mais comment faire, alors que les trajectoires de décarbonation de chaque pays sont totalement différentes et à l’origine de multiples contraintes et tensions ?
Aux Pays-Bas, subventionner les filières à impact est essentiel
Aux Pays-Bas, atteindre les objectifs de réduction des GES passe non plus par les subventions SDE+ (soutien à la production d’ENR), mais par le programme SDE++ qui subventionne désormais la réduction de GES (à la tonne évitée) depuis 2020. En élargissant le portefeuille de technologies éligibles, les projets de chaleur bas-carbone et de production bas carbone sont désormais partie prenante de ce programme de subvention. Le SDE++ met également en concurrence les diverses technologies entre elles via un système d’enchères, pour inciter les candidats à réaliser un projet au coût le plus concurrentiel. Objectif secondaire : optimiser la dépense publique ! De ce fait, seule la partie non rentable des technologies reçoit une subvention.
Mais quels résultats attendre de ce programme ? Il semblerait que le premier cycle de financement soit un succès, avec 4,7 milliards € de subventions distribuées à 3 486 projets. Parmi eux, 87 % concernent des projets de séquestration du carbone (CCS) et de solaire photovoltaïque. Les projets de ce premier cycle ont permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 3,32 MtCO2/an, (dont 70 % de CCS). Ce mécanisme est l’un de ceux mis en place par les Pays-Bas pour accélérer la transition énergétique, avec celui de la taxe carbone ou encore le National Investment Scheme for Indutry Climate Projects (NIKI).
Royaume-Uni, la décarbonation par le déploiement de l’électrique renouvelable
Le Royaume-Uni quant à lui, a depuis 2008 introduit une obligation de réduction de GES d’au moins 80 % en 2050 par rapport au niveau de 1990, ainsi que des budgets carbones fixant les limites de la quantité de GES émise. Actuellement, le mix énergétique électrique du Royaume-Uni est constitué à 22 % d’énergies renouvelables (éolien et solaire), contre 36 % de gaz et 2 % de charbon. En 1980, il était de 67 % de charbon contre 0,5 % de gaz ! On le voit, une transition énergétique est bel et bien possible, et doit être encouragée.
Pour décarboner au maximum ses secteurs, le pays prévoit d’augmenter l’utilisation de l’électricité dans les transports mais aussi le bâtiment et l’industrie. L’éolien en mer également, est en voie de développement avec un objectif de contribuer au maximum à la demande électrique en 2050 : entre 65 et 125 GW. Cette évolution drastique de l’éolien, le pays la doit en partie à la nature de son territoire maritime, aux eaux peu profondes. L’éolien maritime génère également bien moins d’oppositions publiques que l’éolien terrestre…
Enfin, vient toutefois se heurter à cette volonté d’électrisation, la problématique du stockage de l’électricité renouvelable, intermittente. Le pays mise pour cela sur l’hydrogène et les autres solutions en cours de développement pour pallier cette problématique.
Danemark : réduire la dépendance du pays à l’énergie importée
Au Danemark, les politiques publiques de transition énergétique sont avant tout portées par consensus national en misant sur une approbation des accords par le Parlement. Objectif : limiter l’instabilité réglementaire caractéristique des changements d’appartenances politiques des gouvernements successifs. Plusieurs axes sont visés par le pays pour accélérer la transition énergétique :
- Déployer massivement le renouvelable, en misant notamment sur l’éolien au lieu du nucléaire. Actuellement, le pays compte 25 % d’ENR dans sa consommation d’énergie finale. En 2019 et 2020, plus de 50 % de l’électricité danoise a été couverte par le renouvelable !
“En 2030, le Danemark espère atteindre une consommation électrique couverte à 100 % par les énergies renouvelables, avec environ 70 % d’éolien, 20 % de photovoltaïque et 10 % de biomasse et autres bioénergies.”
Rapport de l’Ifri du 22 mars 2022
- Encadrer les efforts d’efficacité énergétique dans le bâtiment. Tout comme en France, la consommation d’énergie dans le bâtiment représente environ 40 % de la consommation globale du pays !
- Développer les partenariats intergouvernementaux pour échanger sur les thématiques climatiques. Le Danemark fait partie des meilleurs élèves en matière de transition énergétique et de renouvelable. De par sa taille, le pays ne rejette toutefois que 0,1 % des émissions de GES mondiales. Il peut donc décupler son impact via ses 19 partenariats, notamment celui fixé avec la France.